Une nouvelle étude basée sur un sondage et publiée à l’approche du deuxième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, révèle que seulement 10 % des Européens, en moyenne, pensent que l’Ukraine sortira victorieuse du conflit. L’opinion dominante, dans les douze États membres interrogés, est que la guerre se terminera sur un « compromis ». Selon les auteurs de l’étude, ce changement d’opinion est dû à l’enlisement de la contre-offensive de l’armée ukrainienne, aux inquiétudes croissantes concernant un changement de politique américaine et aux conséquences que pourrait avoir l’éventuelle réélection de Donald Trump sur l’effort de guerre. Si Trump remportait la présidence américaine, une grande partie des personnes interrogées estime que l’Europe devrait maintenir ou augmenter son niveau de soutien à Kiev. Les co-auteurs de l’étude, Ivan Krastev et Mark Leonard, soutiennent qu’afin de maintenir le soutien de l’opinion publique à l’Ukraine, les dirigeants de l’UE devraient proposer un récit « ancré dans la réalité » et établir une distinction entre une « paix négociée » et une « paix selon les conditions de la Russie ». Le débat consistera à définir ce que signifie la paix. UE, notamment en ce qui concerne le soutien à l’Ukraine et le Green Deal européen.
Le pessimisme s'accroît en Europe au sujet de la guerre entre la Russie et l’Ukraine et de plus en plus de gens craignent qu’une victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines de cette année ne rende une victoire ukrainienne « moins probable », selon un nouveau rapport d’enquête publié aujourd’hui par le Conseil européen pour les relations internationales (ECFR). Cette situation fera de la quête pour définir la paix « un champ de bataille crucial », non seulement lors des prochaines élections européennes, mais aussi pour le conflit lui-même. Pour continuer à présenter des arguments convaincants en faveur de leur soutien à l’Ukraine, les dirigeants de l’UE devront modifier leur discours afin de ne pas paraître irréaliste aux yeux d'une opinion publique sceptique. Le dernier rapport de l’ECFR, « Wars and Elections: How European leaders can maintain public support for Ukraine » (Guerres et élections : comment les dirigeants européens peuvent maintenir le soutien public à l’Ukraine), a été rédigé par les experts en politique étrangère Ivan Krastev et Mark Leonard, en s’appuyant sur les données d’opinion publique de YouGov et Datapraxis recueillies dans 12 États membres de l’UE (Autriche, France, Allemagne, Grèce, Hongrie, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Espagne et Suède) en janvier 2024. L’objectif de ce rapport est de comprendre l’état actuel de l’opinion sur l’Ukraine et de proposer une stratégie pour que les dirigeants de l’UE puissent justifier au mieux le soutien de l'Europe à Kiev dans un environnement de plus en plus difficile. Le sondage dresse un tableau contrasté, avec des raisons de se montrer optimiste et des défis qui devront être pris en compte lorsque les dirigeants plaideront en faveur du maintien ou de l’augmentation du soutien à Kiev. Alors que seulement 10 % des Européens pensent désormais que l’Ukraine triomphera de la guerre, et une majorité des personnes sondées ne souhaitent pas un apaisement. On constate aussi un large soutien en faveur du maintien, voire de l’augmentation, des niveaux d’aide européenne à Kiev dans l'éventualité d'une réorientation de la politique des États-Unis. Les co-auteurs du rapport, Ivan Krastev et Mark Leonard, notent plusieurs tendances dans cet ensemble de données qui devraient influencer la communication politique dans la période à venir. Premièrement, la prise de conscience que la guerre menée par la Russie en Ukraine est désormais principalement considérée comme une guerre européenne, dont les Européens sont responsables ; deuxièmement, un pessimisme quant à l’issue de la guerre et quant à la capacité de l’Ukraine à remporter une victoire sur le champ de bataille ; troisièmement, une reconfiguration du soutien à Kiev parmi ses voisins, y compris la Pologne, où le sentiment d’unité a commencé à s’estomper, contrairement à l’opinion dans des pays plus éloignés, comme le Portugal et la France, où le soutien semble étonnamment ferme ; et, quatrièmement, l’effet Trump sur la politique mondiale est déjà en marche, avant même qu’il ne soit confirmé qu’il sera de retour à la Maison Blanche. Les principales conclusions de la dernière enquête de l’ECFR sont les suivantes :
- Il existe un pessimisme croissant en Europe quant à l’issue de la guerre. Seulement 10 % des personnes interrogées, en moyenne dans les douze pays sondés, pensent désormais que l’Ukraine triomphera de la Russie, tandis qu’ils sont deux fois plus nombreux (20 %) à prédire une victoire russe. La baisse de confiance dans l’effort de guerre ukrainien est visible dans toute l’Europe et, même dans les États membres interrogés les plus optimistes (Pologne, Suède et Portugal), moins d’une personne sur cinq (17 %) pense que Kiev peut l’emporter. Dans tous les pays, l’opinion la plus répandue (partagée par 37 % en moyenne) est que l’Ukraine et la Russie parviendront à un compromis.
- L’Ukraine bénéficie d’un large soutien en Europe, même si des majorités dans certains pays préféreraient pousser Kiev à accepter un accord. Dans trois pays (la Suède, le Portugal et la Pologne) on note une préférence pour un soutien à l’Ukraine dans la reconquête de son territoire (respectivement 50 %, 48 % et 47 %). Dans cinq autres pays, dont la Hongrie voisine (64 %), la Grèce (59 %), l’Italie (52 %), la Roumanie (50 %) et l’Autriche (49 %), il existe une nette préférence pour pousser Kiev à accepter un accord. Ailleurs, l’opinion est divisée, notamment en France (35 % qui sont pour une riposte contre 30 % qui préféreraient négocier un accord), en Allemagne (32 % contre 41 %), aux Pays-Bas (34 % contre 37 %) et en Espagne (35 % contre 33 %).
- Nombreux sont ceux qui considèrent la guerre en Ukraine comme existentielle pour l’Europe. À la question de savoir quel conflit (entre la guerre à Gaza, impliquant Israël et le Hamas, et la guerre en Ukraine) a eu le plus d’impact sur leur « pays » et sur « l’Europe », 33 % et 29 %, respectivement, ont choisi l’Ukraine. Seuls 5 % et 5 %, respectivement, ont répondu que le conflit à Gaza avait un plus grand impact. Cela suggère que les Européens considèrent de plus en plus la guerre en Ukraine et son issue comme un événement d'importance régionale dont ils sont responsables.
- Les Européens considèrent le possible retour de Donald Trump à la Maison Blanche comme « décevant ». 56 % des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête de l’ECFR seraient « assez déçues » ou « très déçues » si Donald Trump était réélu président des États-Unis. La Hongrie est la seule exception à cette tendance. Dans ce pays, 27 % des personnes interrogées ont indiqué qu’elles seraient « satisfaites » de ce résultat, tandis que seulement 31 % ont déclaré qu’elles seraient « déçues ». Dans tous les pays étudiés, les personnes qui espèrent une victoire de Trump constituent seulement la majorité parmi les partisans d’un seul grand parti politique, le Fidesz. Parmi les autres formations de droite, auparavant favorables à l’ancien président américain, seul un tiers environ des partisans de l’Alternative für Deutschland (AfD), du Freiheitliche Partei Österreichs (FPÖ) en Autriche ou des Fratelli d’Italia en Italie seraient « satisfaits » par son retour. Et le sentiment est encore plus faible parmi les partisans des partis Rassemblement National (RN) en France et Droit et Justice en Pologne.
- Certains craignent que Donald Trump ait un impact négatif sur le cours de la guerre et rende une victoire ukrainienne « moins probable ». En moyenne, 43 % des Européens pensent qu’une seconde présidence Trump rendra une victoire ukrainienne « moins probable », tandis que seulement 9 % expriment une opinion contraire.
- 41 % des Européens, en moyenne, estiment que l’UE devrait « augmenter » ou « maintenir » au niveau actuel son soutien à l’Ukraine, dans le cas d’un retrait américain de l’aide sous Trump. Même si seule une minorité (20 %) d’Européens augmenterait le soutien à l’Ukraine pour compenser le retrait des États-Unis, 21 % d’entre eux ont indiqué qu’ils préféreraient maintenir le niveau de soutien inchangé. Un tiers des personnes interrogées (33 %) préféreraient que l’UE suive les États-Unis en limitant son soutien.
Les auteurs notent que les Européens ne sont pas « d’humeur héroïque », ni même optimistes quant à la situation en Ukraine, deux ans plus tard. Cependant, même dans ce contexte, ils affirment que l’engagement des Européens à empêcher une victoire russe n’a pas changé. Cet engagement est également conforté par une position publique plus large selon laquelle, même dans le cas où les États-Unis retireraient leur soutien à l’Ukraine, l’UE devrait soit « maintenir », soit « augmenter » son soutien à Kiev. Krastev et Leonard estiment que cette concurrence entre la baisse de confiance de l'opinion publique quant à la façon dont la guerre se terminera et le maintien du soutien pour empêcher une victoire russe a créé une nouvelle dichotomie. Selon eux, le défi pour les décideurs politiques occidentaux sera désormais de définir en quoi consiste une « paix juste » et d’établir un discours qui empêche Trump (et Vladimir Poutine) de se poser en défenseurs de la paix dans un conflit qui est encore loin d’être résolu. as de vote actuels et, à leur tour, à développer des arguments soulignant la nécessité d’une Europe mondiale dans le climat géopolitique actuel, de plus en plus tendu et dangereux.
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